Le roi nu

Chroniques d'actualité, avec des attributs royaux qui pendouillent.

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Du coup, le roi nu fait le ménage.

Le roi nu aime passionnément la propreté. Les gens sales ne peuvent pas comprendre ça. C’est une question d’éducation. Le roi nu trouve par exemple que le carré est plus propre que le rectangle, qui est plus propre que le rond, qui lui-même est plus propre que le zigzag. Encore qu’un zigzag sinusoïdal soit nettement plus propre qu’un zigzag aléatoire. Plus c’est aléatoire plus c’est sale. Bien entendu, en deux dimensions, c’est toujours plus propre qu’en trois, à cause de la perspective, qui induit par nature, tout un tas de cochonneries. C’est pourquoi le Graal de la propreté est le point ; Graal unidimensionnel, acmé de la civilisation, étoile au firmament immaculé. Certes, le point est un peu seul. Mais très propre. Et il reste plus tangible que le vide, qui certes, est plus propre, mais tellement angoissant ! Si vous ne comprenez pas ça, le roi nu ne peut rien pour vous. Vous êtes sale. Vers l’âge de deux ans, vous avez probablement raté l’examen de passage du stade anal. Le roi nu, lui, l’a réussi haut la main tendue.

En raison de son amour de la propreté, le roi nu aime éradiquer tout ce qui bouge. Oui, ce qui bouge est sale. Et ça désorganise tout ! Voyez un champ rectangle bien labouré en lignes droites parallèles ; si vous n’y prenez garde, des tas de trucs qui bougent vont s’y mettre et c’est sale. Du coup, le roi nu zigouille tout ce qui passe à sa portée. Grace à sa patience et sa persévérance, année après année, le royaume du roi nu est de plus en plus propre.

— C’est le sens de l’Histoire, s’exclame-t’il. C’est le progrès, ça brille !

Maintenant, le roi nu est embêté par des espèces invasives de plus en plus nombreuses en son royaume. Mais le roi nu ne fait pas le rapprochement entre cet évènement et son amour de la propreté. C’est sale, un point c’est tout ! Du coup, il éradique aussi les espèces invasives.

La saleté insécurise le roi nu. La vue de la saleté lui donne des démangeaisons. Car au fond de lui, il sait que les choses qui bougent auront le dernier mot et qu’elles auront raison de sa peau, de ses yeux, de ses entrailles, de ses tendons, de ses cartilages. Vision désagréable qu’il balaye donc, et enfouit inlassablement en astiquant, polissant, coupant au carré, tondant, désinfectant, passant au peigne fin. Et en éradiquant tout ce qui bouge. Comme ça, c’est propre.