Le roi nu découvre progressivement qu’il est en burn-out. Il l’a pressenti dans les jours qui ont précédé le confinement. Il aspirait inconsciemment à ce confinement comme une bouche sèche aspire à une fontaine. Confinez-moi, confinez-moi, suppliait la petit voix intérieure du roi nu. Des années de bull-shit jobs, des milliers d’heures d’embouteillages, gris du trottoir au ciel, une saturation totale de son temps de disponibilité céphalique. Tout cela avait épuisé le roi nu. Lessivé, gobé, sucé, vidé de sa substance. Depuis des années, il courait partout pour ne rien rater des possibilités infinies de son royaume de loisirs. Ce faisant, il ne mangeait plus, mais remplissait son estomac. Il ne dormait plus, mais végétait dans un état second. Il ne travaillait plus, mais remplissait une fonction. Il n’apprenait plus rien, mais consommait des contenus, ce qui flattait son sentiment d’être vraiment le roi de l’univers. Roi nu d’un univers vide en vérité.
Le roi nu est en burn-out. Il commence à s’en rendre compte et ça lui fout la trouille. D’ailleurs aujourd’hui, son réflexe pavlovien est de nier l’évidence ; il dit qu’après le confinement, il va mettre les bouchées doubles pour redémarrer le moteur de la machine économique. Déni. Après le déni viendra la colère. Car son burn-out va lui couper les jambes. C’est ce que fait un burn-out. La tête a été siphonnée. Les jambes d’un canard sans tête ne courent plus une fois arrêtées. Il leur faut une tête et ça prend du temps à recoudre. Beaucoup de temps. Des années.
Le roi nu sait maintenant qu’il est en burn-out mais ne sait pas encore ce que cela signifie, concrètement.