Le roi est nu. L’hiver est long. Le roi hiberne à sa façon.
On le comprend. La nudité, surtout l’hiver, rapproche l’homme de sa vocation première, de son moi profond, de sa nature inaliénable : c’est un ours. Un plantigrade imberbe, grognon et sale. Avec des attributs royaux qui pendouillent.
Du coup, le roi nu a rapproché son canapé Ikea Ektorp (399€) du poêle Godin de son arrière-grand-père. Rapproché tout près. Ainsi lové, les pieds frôlant la fonte brûlante, il hiberne. Dès quelques jours, le canapé, le poêle et le roi nu, forment un tout, sinon homogène, du moins symbiotique, liés entre eux par un magma de bois, de restes alimentaires, de livres et de vieux mouchoirs. Le roi nu, telle une marieuse sicilienne, a entremis l’improbable alliance d’un canapé à obsolescence immédiate, avec un poêle à bois de 1931. Le roi nu hiberne dans un canapoêle. C’est son antre. Il y dort, picole, et mange des cochonneries. Il lit le journal, joue à la crapette, regarde les documentaires d’histoire sur arte, envoie des mails, écoute en boucle les deux derniers morceaux de l’album « famous last words » de Supertramp. Et pleure.
Du coup le roi nu renoue avec la position fœtale. Il est à l’abri des regards, loin des caméras et des courtisans, du chef du protocole et de l’archevêque. Loin même du miroir de la salle de bain. Seuls ses personnages intérieurs peuvent le voir quand il les convoque, et c’est un délicieux soulagement de ne vivre qu’avec eux. L’hibernation abolit le temps. Les jours si courts, les nuits si longues, les sons si atténués. Le temps s’engourdit, figé. L’hibernation suspend le temps et calibre l’espace au vrai nécessaire : un canapoêle.
Le roi est nu. L’hiver est long. Le roi hiberne à sa façon.