Depuis longtemps, c’est naturel, le roi nu a peur de mourir. Rien n’y fait. Ni l’ardeur à engendrer sept descendants dont trois dotés d’attributs princiers qui pendouillent. Ni la gloire acquise au surplomb des champs de bataille et immortalisée augustement sous forme de statues équestres imputrescibles. Ni la prodigalité de ses œuvres de bienfaisance envers les sans-dents-ni-rien-à-se-mettre-dessous du royaume. Du coup, le roi nu a peur de mourir. Comme tout-un-chacun, c’est bien naturel. Mais ces derniers temps, cela s’aggrave en raison de la co-pandémie de virus, de verbiage, et d’égoïsme.
Quoique farouchement opposé au séparatisme entre banque d’affaires et banque de détail, tout chez le roi nu montre maintenant qu’il est parvenu au stade suprême de la séparation de sa majesté d’avec le reste du monde. Totalement. Barbelés à lames de rasoirs, antibactériens rétroviraux fongicides triple action, portes blindées à serrures quatre points, masques barrières pour cacher ce pic ce cap ce roc cette péninsule, couvre-feu qui couve sous la cendre. Séparation totale. Protection totale. Mais du coup le roi nu est seul. Tout seul. Il ne va plus au bal des pompiers, n’invite plus ses potes à jouer à la crapette royale, ne connaît plus sa reine et n’embrasse plus ses princes, ne visite plus sa grand-tante Berthe, ne va plus dormir dans l’écurie avec son petit âne gris les soirs de vague-à-l’âme.
Du coup, le roi nu se rabougrit. Sa majesté se replie sur elle-même. Sa majesté se plie en deux. En quatre (passe encore). En seize, en deux-cent-cinquante-six, en mille-vingt-quatre… Loi de Moore, loi de mort. Le roi nu se rabougrit. Bougrit. Gris.